QUI A PEUR DU TRAITÉ D’INTERDICTION DES ARMES NUCLÉAIRES (TIAN)?
Le 7 juillet 2017, l’assemblée générale de l’ONU a adopté le TIAN par 122 voix et …la non
participation des états nucléaires et de leurs satellites.
QUE PRÉVOIT CE TRAITÉ ?
Une interdiction complète des armes nucléaires et des activités associées. Il sera illégal
pour des États parties d’entreprendre toute activité liée aux armes nucléaires. Il interdit
l’utilisation, le développement, les essais, la production, la fabrication, l’acquisition, la
possession, le stockage, le transfert, la menace d’utilisation, l’implantation, l’installation, ou
le déploiement d’armes nucléaires. [Article 1], (1) La vérification et le contrôle sont
obligatoires. De plus le traité interdit la menace nucléaire (et donc la dissuasion) pour les pays
signataires. Il existe des traités similaires contre les armes chimiques et les armes biologiques
sans entrainer des réactions hostiles internationales. Pourquoi le TIAN, soulève autant de
protestations ? Pourquoi une coalition anti traité est née le 7 juillet au soir sous forme d’une
triple alliance USA/GRANDE BRETAGNE/FRANCE ? Pourquoi il y a la panique chez LE
DRIAN ?
1-Le traité avec ses garanties constitue une attestation indiscutable du statut strictement non-
nucléaire de l’état signataire. Ce statut est nettement plus crédible que les déclarations
verbales des signataires du traité de non prolifération (TNP) dont certains ont un programme
atomique militaire plus ou moins secret, malgré les inspections de l’agence de Vienne. De ce
simple fait, toute attaque atomique y compris préventive contre eux est juridiquement une
agression assimilée à un crime contre l’humanité eu égard à la dissymétrie confirmée par la
simple adhésion au traité.
2- La victime collatérale du TIAN est donc la dissuasion nucléaire tout azimut actuelle,
définie comme instrument de la défense des “intérêts vitaux“ (Lesquels ? on ne le saura
jamais). Cette dissuasion mise en place par CHIRAC et repris par tous ses successeurs
Macron compris, a aujourd’hui du plomb dans l’aile car peu crédible : qui peut croire à une
frappe atomique de la France dite d’avertissement contre un état certifié non nucléaire ?
3- La deuxième victime collatérale est l’OTAN, car le TIAN est une alternative possible au
“parapluie nucléaire“ déployé par les USA (et un peu par la France et l’Angleterre). Faire
partie de l’OTAN qui se définit selon Alain Joxe comme “ une alliance nucléaire exclusive
(2), devient contestable, la dissuasion actuelle étant décrédibilisée, et du coup cher payée car
elle oblige les états membres à augmenter leurs dépenses militaires à 2% du PIB.
D’où le plan B de la triple alliance anti traité qui se déroule en 3 temps :
1- Réactiver la vieille dissuasion anti russe en s’appuyant sur les pays de l’est de l’EUROPE,
pour convaincre les autres à l’efficacité de la dissuasion d’où la danse du ventre devant les
états baltes et les polonais, avec l’envoi de troupes y compris françaises sur le terrain.
2-Menacer d’exclusion les membres sceptiques de l’OTAN, qui constatent que cette
dissuasion n’a pas fonctionné pour empêcher l’anschluss de la Crimée.
3- Amorcer une politique de représailles pour les états européens qui ont voté pour le traité
visant à empêcher la ratification par leur parlement. C’est surtout la Suède qui est visée en sa
qualité de partenaire de l’OTAN et donc de sa place virtuelle sous le parapluie nucléaire.
Malgré la visite du vice président des USA dans les états baltes, cette stratégie n’a pas eu un
succès significatif en Europe, et les gesticulations de TRUMP proposant la CORÉE DU
NORD comme adversaire principal n’a pas arrangé les choses.
QUE PEUT ON FAIRE ?
Pour nous, ici et maintenant, nous devons stopper d’urgence les lamentables litanies des
“spécialistes“ politiques de la dissuasion, ceux que l’on a entendu durant la campagne
présidentielle comme délégués des candidats (de Mélenchon à Le Pen , sans aucune exception
parmi les 5 favoris). Tous ces “sachant“ nous ont déversé leur messe en latin, toute à la gloire
de la bombe, toute en faveur de l’augmentation des dépenses militaires à 2% du PIB.
La seule voie possible est politique : il nous faut ouvrir un vaste débat populaire sur la
dissuasion, sur “notre“ force de frappe et sur la nocivité du plan B de la triple alliance.
Pour briser le discours en chêne massif des adorateurs des armes nucléaires, nous devons
argumenter sur les conséquences de la menace atomique, humanitaires (c’est ce que nous
faisons en tant que médecin), les conséquences économiques (2% du PIB pour en partie
moderniser l’arsenal nucléaire actuel) et morales (qui peut accepter l’assassinat collectif de
centaines de milliers d’innocents pour défendre des supposés intérêts vitaux ?)
La seule voie possible pour se faire est la création d’une coalition de partis, de syndicats et
bien sur des ONG actives dans ce domaine. Ce débat public est essentiel en France d’abord,
en Europe en suite. Nous nous y employons.
BIBLIOGRAPHIE
1-ONU, projet de traité sur l’interdiction des armes nucléaires déposés par le président de la
conférence, A/CONF.229/2017/L.3/Rev.1
2- Alain Joxe, L’OTAN, alliance nucléaire et maintien de l’autonomie stratégique
décisionnelle de la France, Défense & Stratégie N°42 – Automne 2017